17 janvier 2006

Conflit d'intérêts à la SAQ?

Les deux missions de la SAQ
collectrice de taxe
et vente de vin
semblent mener à un conflit d'intérêts.

Jusqu'à maintenant, les dirigeants de la Société des alcools du Québec ont réussi à maintenir assez bien l'équilibre entre ses deux missions: vendre du vin et collecter des taxes. Mais cet équilibre vient d'être brisé. Du moins, le consommateur a l'impression qu'il a été brisé et qu'il y a maintenant conflit patent entre ces deux missions. Elles ne sont plus compatibles.

Il est certain qu'il faudrait revoir le rôle de la SAQ pour éviter des bévues comme celle qu'on vient de connaître.

Il semble bien que plusieurs Québécois souhaitent une révision du mandat de la SAQ, comme le montre notre petit sondage maison.

Privatisation?
On entend beaucoup parler de privatisation de cette société d'État depuis quelque temps. Toutefois, lorsqu'on regarde ces propositions de plus près, on se rend compte que ces groupes, ces gens, ne veulent pas vraiment la privatisation de la SAQ, mais plutôt la privatisation de son réseau de distribution.

Ils veulent faire de l'argent avec la distribution. Ils disent qu'ils peuvent prendre en main ce service à moindre coût pour l'État.

Le consommateur
Si on se place strictement du point de vue du consommateur, il n'y a pas d'avantages à la privatisation du seul service de distribution. Car le réseau de distribution fonctionne assez bien. Ce ne seront que des intermédiaires qui s'ajouteront pour collecter un bénéficie au passage.

Distribution, achat et taxes
Les vrais problèmes actuels sont au niveau des achats et de la fixation des prix. Les prix sont vraiment trop élevés. La SAQ et le gouvernement prennent une marge bénéficiaire trop grande. Souvent on triple le prix. Un vin acheté 5 $ se vend 15 $.

De plus, on considère toujours le vin comme un produit de luxe, alors qu'il y a un changement dans la société québécoise, on tend de plus en plus à le considérer comme un produit de consommation.

Vendre du fromage et du vin
D'autre part, la SAQ est le seul acheteur. Ses employés sont les seuls à choisir les vins qui seront offerts aux Québécois.

Est-ce vraiment le rôle de fonctionnaires de l'État de décider ce qu'on va boire?

Donc, pour que la privatisation soit avantageuse, il faudrait qu'on puisse commercer le vin, comme le fromage, les légumes ou tout autre produit alimentaire. Qu'on puisse les choisir, les importer et les distribuer librement, en respectant les lois bien sûr.

Mais est-ce que le gouvernement serait prêt à laisser tomber cette SAQ qui lui rapportera un milliard de dollars dans quelques années?

L'État vendeur d'alcool
La SAQ est maintenant perçue par le gouvernement comme un moyen de percevoir des taxes, des revenus et non comme un service à la population.

Le rôle de protection du public n'est plus crédible dans ce domaine. Nous ne sommes plus en 1930.

Alors, le sujet de la privatisation va être dans l'actualité encore pour longtemps. Éthiquement, moralement et commercialement, il n'y a plus de raison pour que l'État vende de l'alcool.

Il y aura sûrement des changements d'ici quelques années. Toutefois, il faudra veiller à ce que le consommateur en profite.

Si en plus de l'État, d'autres intermédiaires viennent puiser dans les poches des citoyens acheteurs de vins, on se fera avoir.

Donc, ce n'est pas si simple. La SAQ a assez bien joué son rôle jusqu'à maintenant. Même s'il y a place à l'amélioration, le public québécois est assez bien servi. Les produits sont de qualité et en bonne quantité.

Toutefois, le scandale des derniers jours a entaché fortement la réputation des dirigeants actuels de la société d'État.

Selon l'enquête de deux journalistes de La Presse, des employés de la SAQ ont incité des fournisseurs à hausser leurs prix.

Le consommateur a l'impression qu'on a tenté de le tromper. La confiance n'y est plus.

Où est l'opposition?
Le gouvernement semble appuyer la position actuelle de la SAQ. Où est l'opposition? Les gens du PQ sont très discrets. Eux, ils aspirent au pouvoir et voudront conserver cette source de taxes. M. François Legault a bien déclaré à La Presse le 12 janvier «Peut-être que parfois, ça vient un peu en conflit, mais je pense que c'est possible de gérer les deux missions en même temps». Mais plus rien depuis.

Qu'est-ce qui attend le consommateur?
Alors, le consommateur se retrouve dans une position passive. Attendre et voir. Est-ce qu'on peut faire autre chose?

Est-ce qu'il serait possible de privatiser la vente de vin, mais que la SAQ conserve la vente d'alcool fort? Les épiceries ont bien la bière.

Est-ce que les groupes de défense des consommateurs peuvent s'engager dans ce dossier?

Est-ce que l'Ontario va bouger et privatiser une partie de son réseau? Ce qui aura des conséquences au Québec.

Est-ce qu'on est prêt à augmenter nos impôts ou d'autres taxes pour réduire celles sur le vin?

J'ai bien l'impression qu'il va se passer bien des choses dans ce dossier au cours des prochaines années.

C'est à suivre.

En attendant, j'ouvre une bonne bouteille de chianti. Ça donne quelques dollars au producteur et beaucoup au gouvernement qui, je l'espère, en dépensera un peu plus pour soigner adéquatement nos personnes âgées.

À votre santé


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D'autres informations sur le sujet SAQ:Participez à notre sondage maison.


Marc André Gagnon